lundi 27 mai 2013

Pourquoi signer la pétition contre la Sacem

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Message : La Sacem suite 
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http://partagedialoguejeanloup.blogspot.com/2013/05/la-sacem-suite.html 

Plongée au coeur du système SACEM : le droit d’auteur comme alibi ?

Le droit d’auteur est devenu l’otage d’une industrie qui l’utilise comme un prétexte, qui empêche toute remise en cause d’un système injuste de rétribution des auteurs. Lors des débats DADVSI, les défenseurs de ce droit d’auteur ne se sont comptés que parmi quelques industriels de la profession et certains artistes connus : ce n’est pas par hasard.
Qu’est-ce que la SACEM ?
Notons que la SACEM n’est qu’une des entreprises de perception des droits d’auteur parmi d’autres.
Elle représente 60 % des perceptions en 2006,mais d’autres sociétés sont aussi sur ce secteur lucratif de la répartition des droits, comme la SACD et la SCAM. 
Le domaine de la SACEM est celui de la musique :
- oeuvres musicales avec ou sans paroles : pop, rap, rock, musique symphonique, électroacoustique,techno, musique de film, publicité
- documentaires à caractère musical (textes et musiques)
- poésies et sketches
- productions audiovisuelles utilisant des oeuvres de son répertoire (vidéomusiques)
- extraits d’oeuvres dramatiques et de drames musicaux d’une durée inférieure à 30 minutes pour la télévision et à 20 minutes pour la radio
- sous-titrages et doublages de films et de séries
La SACEM est une entreprise privée.
La SACEM a été créée en 1850 à le suite d’un procès intenté par trois musiciens qui refusèrent de payer une consommation à un propriétaire de bar qui utilisait leurs oeuvres sans les rétribuer.
Les trois musiciens gagnèrent ce procés.
A la suite de ce procès, certains auteurs se réunirent en syndicat des auteurs, puis créèrent une société de droit privé.
La SACEM est donc bien, dès l’origine, un syndicat défendant des idées corporatistes, qui se transforme en une société de droit privé ayant comme objectif une collecte de fonds au profit des seuls sociétaires de cette entreprise.
La SACEM récolte environ 700 millions d’euros de redevance chaque année.
Or, l’entreprise privée a une organisation quelque peu particuliére : elle a en effet quelques "petites soeurs" qui vivent à ses crochets et augmentent de manière substantielle ses coûts de fonctionnement.
Elle délègue à deux entités le soin de collecter les taxes sur les supports numériques (VHS, DVD ...) et les supports audios. Ces deux mêmes entités délèguent à un organisme tiers, la SDRM, le fait de percevoir les droits pour elles.
On peut ajouter au tableau de la SACEM d’autres entités comme l’Adami, la Spedidam, la SCPP, la SPPF... qui ont chacune leur niche.
Les seuls frais de fonctionnement de la SACEM se chiffrent à 20% des sommes récoltées, soit quand même un peu plus que 140 millions d’euros pour moins de 1500 salariés.
Sur les 560 millions d’euros qui restent (en gros), la SACEM en distribue 25% aux auteurs, 25% aux compositeurs et 50% aux éditeurs.

C’est-à-dire que les artistes/compositeurs voient finalement leur part ramenée à 280 millions d’euros, soit 40% des sommes initiales collectées
.
On note d’ailleurs une augmentation des frais de gestion, au détriment de la part de distribution.
Cette tendance ne semble pas propre à la SACEM, mais concerne toutes les sociétés gérant les droits d’auteur ; un rapport annuel de 2006 d’une entité gouvernementale note que :
"Les montants utilisés se situent autour de 60 % des montants disponibles. Les affectations aux ayants droit représentent autour de 42 % des montants disponibles des sociétés concernées. Aucune accélération des répartitions ne vient diminuer le montant des droits perçus en instance de répartition et les affectations aux ayants droit se situent en moyenne à 75 % des perceptions. Les charges de gestion progressent de 17 %, moins vite que les perceptions..."
Dans ce maquis de sociétés - toutes privées - il y a quelques anachronismes, comme le fait qu’aucune société ne s’occupe des musiciens en ligne : en gros, les musiciens en ligne ne touchent rien.
Le GESTE (Groupement des éditeurs de services en ligne) n’a conclu qu’un accord sur les téléchargements gratuits, ce qui faisait dire dans un encart sur le blog lestelechargements.com que "les artistes laissant à disposition leurs oeuvres gratuitement sur ce site devront payer les frais SACEM inhérents".
En fait, vous pouvez, à partir d’un site personnel, diffuser vos oeuvres du moment que vous le faites en streaming, mais pas en laissant télécharger le morceau sur le disque dur du visiteur.
Certains enquêtes, comme celle menée par Iréne Inchauspé et Rémi Godeau dans Mains basses sur la musique, vont encore plus loin, en revenant à la fois sur l’histoire de la SACEM et sur son fonctionnement actuel.
On y apprend en particulier que les administrateurs sont les premiers à bénéficier des largesses de la SACEM. 
Jean-Loup Tournier, ancien président de la SACEM, quand il était encore dans l’institution, s’était fait offrir, selon les deux journalistes, un appartement dans un quartier cossu de la capitale.
Les sociétaires seraient, eux, écartés de la marche effective de l’institution ; les convocations aux assemblées générales paraissent dans deux revues confidentielles...
Seuls quelques gros sociétaires recevraient une convocation personnelle.
Sur le système de rétribution lui-même, là aussi, un exemple assez surprenant vient illustrer l’objet de cet article.
Michel Colombier, mort en 2004 à 65 ans, compositeur de musique de film connu et émigré aux Etats-Unis, est révélateur des failles du système SACEM et de l’attitude de cette société vis-à-vis des auteurs qu’elle prétend défendre.
Cet artiste a, en 1999, découvert avec étonnement que l’air du jingle publicitaire "Des pâtes, des pâtes, oui mais des Panzani", une de ses oeuvres, avait été exploité massivement par la marque éponyme. En toute légalité, certes... Mais la SACEM ne lui a versé que 4356 euros pour une des publicités majeures des années 1990.
Il avait assigné en justice Panzani et la SACEM... La SACEM lui opposa que cette musique n’était pas la sienne, mais était inspirée en fait d’une musique folklorique italienne. J’avoue ne pas avoir trouvé trace du jugement final, certainement parce que le plaignant était mort.
Au-delà du résultat de ce jugement, il convient de questionner la manière dont la SACEM pense sa relation avec les artistes qu’elle est censée défendre. Son attitude lors de l’affaire Collombier est quelque peu étonnante, au vu de sa mission initiale.
En fait, l’artiste donne à la SACEM le droit ou non d’utiliser ses oeuvres, même contre son avis.
Pour preuve, un mail envoyé par un artiste à la SACEM, auquel la SACEM répond : Pour délivrer l’autorisation (de diffusion, nldr), nous ne demandons pas aux producteurs l’autorisation des artistes.
Nous voyons ainsi qu’une partie de l’argumentaire entendu pendant la DADVSI sur la liberté de l’artiste à disposer de son oeuvre vole en éclats, vu que la SACEM s’en affranchit elle-même légalement.
Pire... Pour exploiter des artistes non protégés ou sous licence libre (Creative Commons, par exemple), il faut aussi demander une autorisation à la SDRM - l’organisme rattaché à la SACEM délivrant les autorisations de reproduction. (C’est en fait le presseur qui doit le faire).
En résumant la situation : ce que vous faites ne vous appartient plus et ce qui n’appartient pas à la SACEM appartient quand même à la SACEM. 
Cette dernière phrase est un peu rédutrice, vu que la situation est très complexe, mais elle illustre généralement le sentiment de la SACEM vis-à-vis de tout ce qui se développe sans elle.
Je me permets d’ailleurs de placer ici un droit de réponse SACEM qui permet aussi de contrebalancer certains arguments, en précisant bien que la SACEM ne protège pas les artistes, mais les auteurs, compositeurs et éditeurs de musique...
Une partie d’ailleurs des malentendus sur la SACEM provient de cette confusion, et explique quelques cas troublants, mais ne permet pas de lever les doutes sur l’opacité et la complexité d’un système .
A qui profite la SACEM ?
Il y a environ 3000 auteurs qui peuvent vivre de leurs droits, moins de 2000 si vous placez la barre à 15 000 euros par an, soit quelque 3000 personnes en France qui se partagent un jackpot de 280 millions d’euros.
Le plus scandaleux est que les revenus issus de la vente de disque n’en représentent qu’un cinquième.(voir ici ou encore ici) laissant alors la radio et la télévision être les seuls vrais baromètres de la popularité pour la SACEM : les droits seront en effet reversés en fonction de ces prestations.
Chose amusante, au niveau de la télé et de la radio, on notera enfin qu’une part significative des droits collectés par la SACEM relève déjà de systèmes de licence légale .
Nous n’avons donc, finalement, qu’une centaine d’artistes qui gagnent très bien leur vie en engloutissant une bonne part des prestations : ce sont ceux qui passent à la télévision et à la radio.
En reprenant l’ensemble de l’article, nous avons donc :
Une société de droit privé, régnant sur un monopole, garantie par l’Etat, récoltant prés de 700 millions d’euros pour le seul profit de sa structure - 1500 employés - et de quelques priviligiés... La SACEM construit donc au bout du compte une véritable nomenklatura culturelle.
Le dernier point pour finir d’illustrer le manque de crédibilité de la SACEM - quand elle s’amuse à se poser en garante d’une certaine attitude morale vis-à-vis des auteurs et de leurs oeuvres - est son attitude durant la Seconde Guerre mondiale.
En effet, cette entreprise a traversé les époques les plus difficiles de notre pays, et s’est comportée comme beaucoup d’industriels de l’époque durant les années d’occupation nazie... Elle n’a pas hésité à servir la soupe, comme on lui demandait de le faire.
Ce n’est pas un site de propagande qui allume la mèche, mais bel et bien un journal établi, à savoir L’Express.
S’il se trouve que la mission Mattéoli -sur la spoliation des juifs durant la Seconde Guerre mondiale-blanchit la SACEM des accusations de détournement, elle souligne en revanche la « xénophobie » de ses responsables de l’époque.
Il est en particulier intéressant de savoir que la SACEM demandait un certificat « d’aryanité » à ses nouveaux sociétaires.
Les chercheurs concluaient que « les droits d’auteur [avait été] librement versés à tous les sociétaires en situation de venir les recevoir », et assurent que ceux qui étaient « cachés, partis à l’étranger ou déportés » avaient dû les retrouver à leur retour.
Le problème est qu’il n’y a aucune trace de ces versements... Nous avons bien retrouvé les documents comptables de la Sacem sur lesquels figurent les sommes allouées à chaque auteur, explique le musicologue Yannick Simon, qui a rédigé le rapport, mais il ne subsiste par contre aucune trace des ordres de versement.
Certes, les administrateurs de 2006 n’ont plus rien à avoir avec ceux de 1941, mais on peut voir à travers son histoire que le seul objectif de la SACEM a été de faire de l’argent, coûte que coûte.
Le seul objectif de la société est d’ordre purement économique : les états d’âme des artistes ne sont que des arguments à opposer aux tenants d’une démocratisation et d’une mise en concurrence des systèmes de rétribution des auteurs.
Ce droit d’auteur-là peut donc légitimement apparaître comme un alibi au service d’une volonté monopolistique d’industriels constitués en groupe de pression.
Cette situation monopolistique ne pouvait d’ailleurs qu’attirer les foudres de Bruxelles, grand pourfendeur des systèmes anti-concurrentiels.
Il paraît de plus en plus évident que la SACEM et consorts sont finalement de très mauvais défenseurs du droit d’auteur, car leurs actions et leurs attitudes depuis plusieurs années ne trahissent qu’une vision purement mercantile de la culture, et donnent des arguments convaincants aux partisans d’une remise à plat de ce système.

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